Est-ce qu’un singe investit mieux que vous (ou que Tante Agathe) ?

Deux hommes d’affaires en costume se tiennent au bord d’une falaise. Ils ont l’air affligés en voyant des billets d’un dollar engloutis par les flammes au fond du ravin. Un homme tient une mallette et l’autre est penché. Le ciel est dégagé avec quelques nuages en arrière-plan.

On n’apprend pas aux vieux singes de Wall Street à investir

Burton Malkiel, économiste de renom, a écrit dans son livre « A Random Walk on Wall Street » qu’ « un singe aux yeux bandés jetant des fléchettes sur les pages financières d’un journal pourrait sélectionner un portefeuille aussi performant que celui soigneusement choisi par des experts. » Selon B. Malkiel, ni le singe ni le gestionnaire de portefeuille ne peuvent surpasser les indices de référence, car les prix des actions évoluent de manière aléatoire. Cette déclaration audacieuse a été perçue comme un véritable affront à la gestion active de fonds, ce qui a mené à une série d’expériences pour tester sa validité.

Pour mieux comprendre cette histoire, suivons Tante Agathe. Vous vous souvenez sûrement d’elle et de son héritage dans notre article sur la volatilité des marchés. Désireuse de placer son petit pactole et intriguée par cette histoire de singes, elle décide d’en apprendre davantage.

L’expérience de Robert Arnott

L’expérience la plus célèbre pour évaluer la déclaration de B. Malkiel fut menée par Robert Arnott et son équipe. En effet, ces derniers ont simulé le choix d’un singe en sélectionnant aléatoirement 100 portefeuilles de 30 actions parmi les 1.000 plus grandes capitalisations boursières,chaque action ayantle même poids dans l’indice. Ce processus a été répété chaque année de 1964 à 2012. Et ça n’a pas loupé ! Au-delà des prédictions de Burton Malkiel, les singes ont battu le marché 96 fois sur 100.

Le succès des chimpanzés : entre hasard et expertise

Tante Agathe devrait-elle alors courir à l’enclos des chimpanzés pour leur confier tout son héritage ? Pas exactement. Tout est une question de pondération. Dans les fonds indiciels traditionnels comme le S&P 500, le poids de chaque entreprise dépend de sa capitalisation boursière. À l’inverse, l’index des singes pondère chaque entreprise de manière équitable, donnant par défaut plus de poids aux petites capitalisations. Ces petites entreprises ont des potentiels de croissance intéressants et peuvent offrir des rendements substantiels, contrebalançant les pertes d’autres actions. D’ailleurs, si nous appliquions une pondération équitable à un index traditionnel, celui-ci surpasserait les fonds indiciels expérimentaux des singes.

Cependant, comme l’a si bien dit Nicolas Nassim Taleb, célèbre écrivain et statisticien, si l’on place un nombre infini de singes devant des machines à écrire, l’un d’entre eux finira par taper une version exacte de l’Iliade. Mais parieriez-vous toutes vos économies sur le fait que ce même singe écrira ensuite l’Odyssée ? Pour Tante Agathe, il n’en est pas question !

La performance extraordinaire de quelques-unes des actions choisies au hasard ne garantit pas que chaque choix sera gagnant. Les petites capitalisations peuvent rapporter gros mais présentent également une volatilité plus importante. Bien qu’originales, Tante Agathe rechigne à investir l’argent dûment gagné de ses parents dans ce genre de stratégies aléatoires diversifiées. L’idée de battre le marché en laissant un singe choisir les actions était avant tout une manière humoristique d’illustrer qu’une stratégie d’investissement diversifiée aléatoire peut être aussi performante qu’une stratégie à risque identique élaborée par des experts.

L’hypothèse des marchés efficients

Toutefois, cette expérience illustre un point important : l’hypothèse des marchés efficients dans leur forme semi-forte. Selon cette hypothèse, les acteurs se comportent de manière totalement rationnelle, et les prix devraient refléter toute l’information publiquement disponible. Donc, si tout le monde possède les mêmes informations sur une entreprise et si tout le monde est rationnel, alors, tout le monde devrait attribuer le même prix aux actions de cette entreprise. Le cas contraire signifierait que certains acteurs possèdent des informations privilégiées.

Si cette hypothèse est vraie, en moyenne, il serait compliqué pour les gestionnaires de fonds de constamment surperformer le marché ou de faire mieux qu’un portefeuille aléatoire (comme celui des singes). Ceci est d’ailleurs illustré sur la Figure 1, où l’on voit que la majorité des gestionnaires actifs de grandes capitalisations ont sous-performé le S&P 500 pour la 14ème année consécutive.

Figure 1 – La plupart des fonds d’actions américaines à grande capitalisation gérés activement ont sous-performé le S&P 500 20 années sur 23.

Un graphique à barres intitulé « Tous les fonds à grande capitalisation » montre le pourcentage de fonds actifs à grande capitalisation sous-performants de 2001 à 2023. Les barres représentent les années, avec des pourcentages de sous-performance allant de 51 % à 89 %. Le pourcentage moyen de sous-performance au fil des années est indiqué par une ligne pointillée. La source est S&P Dow Jones Indices LLC, CRSP, avec des données au 31 décembre 2023.

Réduire les frais pour maximiser les rendements

Pour conclure, Burton Malkiel ne compare pas les experts à des singes simplement pour provoquer, mais pour illustrer que la bourse suit souvent les principes des marchés efficients. L’expérience de Robert Arnott montre que les choix faits au hasard peuvent parfois surpasser ceux des experts. Par conséquent, minimiser les frais de gestion (plus élevés en gestion active) en adoptant une gestion passive et en investissant dans des fonds indiciels diversifiés peut être une stratégie judicieuse pour Tante Agathe et de nombreux autres investisseurs.

Cela dit, rien ne vous empêche de réserver une petite partie de votre argent, que vous êtes prêt à risquer, pour la gestion active. Après tout, les marchés ne sont pas toujours parfaitement rationnels. Votre conseiller pourra vous offrir une gamme de produits variés, tels que des investissements en private equity, en immobilier, ou encore dans des matières premières. Il pourra également vous proposer des services financiers globaux, tels que la planification fiscale et patrimoniale, optimisant ainsi la gestion de votre patrimoine en fonction de votre cycle de vie. Bien que l’expérience de Robert Arnott remette en question la gestion active, elle n’enlève rien à la valeur ajoutée de ces services personnalisés.


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Sources

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